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Ps 24,1 de David

mardi 7 septembre 2010, par Frère Paul

David, le doux chantre d’Israël

Les psaumes comportent généralement un titre ou suscription, hélas omis dans certaines éditions françaises (le Psautier œcuménique liturgique par exemple). Selon l’exégèse historico-critique (moderne), ces titres ou suscriptions auraient été ajoutés après-coup par les compilateurs et éditeurs juifs du psautier. Ils n’en font pas moins partie des saintes Écritures et fournissent des indications précieuses pour l’interprétation, y compris musicale, des ces poèmes.

Dans 77 de ces titres, le psaume est attribué au roi David au moyen d’un lamed auctoris : à savoir, un emploi particulier de la préposition ל־ pour indiquer non le destinataire ou le bénéficiaire, mais l’auteur d’une œuvre [1]. Ainsi, on a 29 fois מִזְמוֹר לְדָוִד « psaume de David ».

Or, on trouve aussi 7 fois la variante : לְדָוִד, מִזְמוֹר « De David, psaume » (Ps 24,1 ; 40,1 ; 68,1 ; 101,1 ; 109,1 ; 110,1 ; 139,1). Cette particularité n’échappe pas au midrash Shoḥer Tov, qui en tire un enseignement lumineux sur l’inspiration.

David et l’Esprit-Saint

א לְדָוִד, מִזְמוֹר, לַיהוָה, הָאָרֶץ וּמְלוֹאָהּ. אָמַר ר׳ חֲנִינָא, זֶה שֶׁאָמַר הַכָּתוּב עַל יְדֵי אִיּוֹב, צֶדֶק לָבַשְׁתִּי, וַיִּלְבָּשֵׁנִי (איוב כט יד), (א) אָמַר ר׳ הֲנִינָא יֵשׁ נָאֵה לַלְּבוּשׁ וְאֵין לְבוּשׁוֹ נָאֵה לוֹ, וְיֵשׁ שֶׁאֵין נָאֵה לִלְבוּשוֹ, וּלְבוּשׁוֹ נָאֵה לוֹ, יֵשׁ אָדַם שֶׁהוּא עָשִׁיר, וְאֵין שְׁמוֹ לְפִי עָשְׁרוֹ, ויש רש ואין שמו לפי עניותו, וכן אמר שלמה מלך ישראל, יֵשׁ מִתְעַשֵּׁר וְאֵין כֹּל, מִתְרוֹשֵׁשׁ וְהוֹן רָב (משלי יג ז). […] אָמַר אִיּוֹב אֲנִי אֵינִי כֵן, אֶלָּא צְדָקָה נָאָה לְאִיּוֹב, וְאִיּוֹב נָאֵה לִצְדָקָה, הָרֵי צֶדֶק לָבַשְׁתִּי, וַיִּלְבָּשֵׁנִי. (ד) וְכֵן דָוִד נָאֵה לְמִזְמוֹרוֹ, וּמִזְמוֹרוֹ נָאֵה לְדָוִד, מָה כְּתִיב לְמַעֲלָה, [מִזְמוֹר לְדָוִד] ה׳ רֹעִי לֹא אֶחְסָר (תהלים כב א) [וְכָאן] לְדָוִד מִזְמוֹר, וּמָהוּ מִזְמוֹר לְדָוִד, (ה) כְּשֶׁהָיָה מְבַקֵּשׁ שֶׁתִשְׁרֶה עֲלָיו רוּחַ הַקֹּדֶשׁ הָיָה תוֹבְעָהּ מִזְמוֹר לְדָוִר ,[וּכְשֶׁהָיְתָה בָאָה מֵעַצְמָהּ, לְדָוִד מִזְמוֹר] :

1 De David, psaume. Au Seigneur, la terre et ce qui l’emplit. R. Ḥaninah dit : C’est ce que dit l’Écriture par la bouche de Job : (Job 29,14) J’ai revêtu comme un habit la justice, et elle m’a revêtu. (א) R. Ḥaninah dit : il y celui qui porte bien, mais à qui son habit ne sied pas ; et celui qui porte mal, mais à qui son habit sied. Il y a l’homme riche dont la réputation ne correspond pas à la richesse, et le pauvre dont la réputation ne correspond pas à la pauvreté. Salomon, le roi d’Israël, l’a dit : (Pr 13,7)Tel fait le riche, qui n’a rien ; tel vit pauvrement, qui a de grands biens. (...) Job dit : il n’en va pas ainsi de moi, mais la justice sied à Job et Job à la justice. C’est cela : J’ai revêtu comme un habit la justice, et elle m’a revêtu. (ד) De même, David sied à son psaume et son psaume à David. Qu’est-il écrit plus haut (Ps 22,1) Psaume de David. Le Seigneur est mon Berger, je ne manque de rien. Et ici : De David, psaume. Que veut dire psaume de David ? Quand il demandait à l’Esprit saint de reposer sur lui, il lui réclamait : un psaume pour David ! Et lorsque l’Esprit saint venait de lui-même, David a un psaume !

Lorsqu’il joue ainsi sur les différentes valeurs du ל־ (pour indiquer la destination/le possesseur/l’auteur), le midrash est peut-être plus fondé qu’on ne pourrait le croire. En effet, selon Cazelles, « La question du ’Lamed auctoris’ », Revue Biblique 56 (1949) 93–101, il s’agirait en fait d’un lamed de titulature, indiquant la destination ou le classement, compris ultérieurement comme lamed auctoris...

Quoi qu’il en soit, ce midrash est porteur d’un enseignement profond : l’auteur des psaumes convenait à l’Esprit saint, comme l’Esprit saint lui convenait. Telle est l’inspiration : ni dictée divine, ni pure création humaine, mais intime correspondance et échange. Et pour nous, aujourd’hui, quelque chose d’analogue se produit : chaque fois que nous disons un psaume dans la foi, l’Esprit saint est là qui le murmure en nous, le fait nôtre et nous fait sien.

Notes

[1] Cf. Joüon, §130 b.

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